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Touaregs:1990–2010:Vingt années d’une renaissance en marche

Auteur: jackie01
Date: le 08/05/2010 à 10:23
Le 7 mai 1990 très exactement commençait à Tchin-Tabaraden une série de massacres des populations civiles touarègues. En ce vingtième anniversaire du début de cette tragédie, qui a touché d’abord le Niger, ensuite à la fois le Niger et le Mali, et dont nous n’avons pas encore su tirer tous les enseignements, il convient de tenter de faire le point et de rappeler que ce que les Touaregs éprouvent dans leurs difficultés à se faire entendre, accepter et, éventuellement, écouter, peut survenir n’importe quand à n’importe qui, presque sans raison et surtout pas en raison d’une bonne raison.

D’innombrables exemples du même genre de par le monde devraient faire prendre conscience que ces terribles événements n’arrivent pas qu’aux autres et qu’ils doivent imposer à tous des comportements impeccables, responsables et, surtout, empreints d’une patience infinie afin de persuader les voisins, les compatriotes et les observateurs du monde entier que, par exemple, la survie et la participation des Touaregs à la vie des Etats modernes dans lesquels ils ont été intégrés ne sont pas incompatibles.

Ces deux dernières décennies ont aussi été marquées par l’éclosion d’une résistance touarègue qui cherche toujours sa voie dans un environnement où le droit et la justice s’effacent encore trop souvent devant l’arbitraire et la force des intérêts des plus forts…


Les Touaregs habitent le Sahara central et les bordures du Sahel. En l’absence de statistiques fiables, leur nombre peut raisonnablement être estimé à plus de 5 millions de personnes, dont 85 % au Mali et au Niger. Dans ces deux pays, composés d’une dizaine d’ethnies chacun, les Touaregs représentent respectivement 10 % et 20 % de la population totale.

Ainsi, le 7 mai 1990 commençait d’abord au Niger, puis au Mali, un cycle de répressions et de destructions qui se soldera par la mort de plusieurs milliers de Touaregs. Ces massacres demeurent à ce jour impunis. Parfois même leurs auteurs ont été tout simplement récompensés à coups de promotions diverses, comme en temps de guerre. Ce qui a engendré une réelle émulation à ne surtout pas permettre un retour rapide à la paix, afin que ces promotions, bienvenues par ces temps si cruels pour la solde, perdurent !

L’attitude de la communauté internationale, notamment des ONG, des organisations de défense des droits de l’homme, est apparue pour le moins curieuse au cours de ces différents événements et a relevé plus du banal "deux poids deux mesures" qu’on observe, souvent, dans la gestion des questions à "faible intérêt géopolitique", que d’une réelle connaissance des enjeux. Ainsi des hommes qui ont du sang sur les mains peuvent-ils se targuer d’être d’aussi bons démocrates que certains grands acteurs internationaux ont fait le choix de fermer les yeux, voire de se rendre complices de leur impunité.

Les accords de paix, signés en 1992 et 2006 pour le Mali et en 1995 pour le Niger, ont essentiellement permis, dans les faits, de désarmer les Mouvements armés touaregs. En revanche, ces accords n’ont à l’évidence pas été respectés par les États signataires sur le volet politique, notamment en ce qui concerne l’amélioration du partage des pouvoirs entre les communautés qui composent ces pays.

Depuis 2006, on a assisté à une reprise des affrontements militaires entre des mouvements touaregs et les armées malienne et nigérienne. Cette situation s’est accompagnée d’une détérioration de la situation des droits de l’homme dans ces pays. Au Niger, des dizaines de civils ont été tués et près de cent personnes ont été arrêtées et accusées de sympathie pour la cause touarègue. A la suite d’une médiation de la Libye, plusieurs groupes ont accepté de déposer les armes et de rentrer au pays. Mais la question politique de fond reste posée. Au Mali, malgré les bons offices de l’Algérie et de la Libye, la tension reste vive entre le pouvoir central de Bamako et des groupes touaregs. Ces derniers réclament toujours l’application des accords signés en 1992 et 2006.

Survie Touarègue-TEMOUST déplore le silence des sociétés civiles de ces deux pays et appelle, une fois de plus, leurs élites politiques à faire cesser cette injustice et à créer les conditions d’une véritable culture de paix, ce qui suppose en premier lieu la fin de l’impunité.

Survie Touarègue-TEMOUST s’est souvent interrogée sur le sens à donner au mutisme de la France, principal "partenaire" économique et politique de ces deux pays. Le rôle passé et présent de la France, dans cette situation, lui confère une responsabilité qu’elle ne peut évacuer par le seul truchement de la convenance diplomatique ou par le respect d’une illusoire souveraineté du Mali et du Niger.

Le contexte actuel

Aujourd’hui, la question touarègue reste plus que jamais d’actualité, et ces deux pays (Niger et Mali) donnent l’impression de perdre progressivement la main sur une question qu’ils n’ont en réalité jamais su gérer.

Combien de jeunes Touaregs obtiennent des bourses pour suivre des études supérieures ? Combien de leaders touaregs détiennent réellement une parcelle de pouvoir au Mali comme au Niger ? Dans quelle proportion les Touaregs sont recrutés dans la Fonction publique, l’armée et les autres corps de l’Etat ? Combien d’heures sont consacrées à la culture touarègue dans les radios et les télévisions de ces pays ? Toutes ces questions restent taboues, mais sont dans tous les esprits et dans toutes les conversations pour expliquer les différends qui opposent ces Etats et leurs communautés touarègues.

La décentralisation, initiée d’abord au Mali et ensuite au Niger, permet aujourd’hui aux populations touarègues de reprendre l’initiative et de s’atteler au développement local de leurs régions. Cette décentralisation, même si elle n’est que rarement accompagnée des moyens pouvant permettre sa mise en place effective, ouvre néanmoins la voie vers une évolution des mentalités et un apprentissage de la gestion locale des affaires publiques dans un cadre politique nouveau et concurrentiel.

Les Touaregs sont cependant encore absents des rouages essentiels des politiques nationales et n’ont toujours pas un accès équitable aux moyens de leurs Etats. Leurs expressions culturelles sont encore très rares sur les médias publics et les moyens économiques gérés par ces Etats ne leur parviennent que dans des proportions très négligeables…

Nous savons que le processus démocratique en cours ne peut, de toute évidence, pas avoir sa pleine signification dans des pays où l’analphabétisme est encore à des niveaux records et où la perception du politique est essentiellement structurée par des considérations ethniques. L’absence d’Etats impartiaux et de sentiments véritablement nationaux rend encore plus indispensable le respect des équilibres entre les différentes composantes socioculturelles de ces pays.

Les décennies qui viennent de s’écouler ont montré que la construction d’une nation ne se décrète pas et que seule l’adhésion de l’ensemble des peuples à un projet national respectant toutes leurs spécificités peut garantir la pérennité des ensembles étatiques et la stabilité dans la région. Cette « unité dans la diversité » suppose une volonté politique des élites, mais aussi un soutien positif de la communauté internationale

Les Touaregs n’ont certes plus l’image de « parias » des années 70 et 80, mais la réalité du pouvoir politique leur échappe toujours et ils ne disposent toujours pas d’un accès équitable aux vrais cercles de décision. Cela aussi bien au Niger qu’au Mali. Il faudrait que les hypocrisies du passé laissent la place à des politiques volontaires et responsables pour permettre aux peuples de ces deux pays de vivre dans la paix et la stabilité.

Sur le plan international, le paternalisme devrait faire rapidement place à une autre forme de coopération plus équilibrée et plus respectueuse qui accompagne les mutations institutionnelles nécessaires aussi bien à la consolidation des Etats qu’à l’instauration de systèmes politiques véritablement démocratiques.

Aujourd’hui, il s’agit pour les Touaregs de ne compter que sur leur propre dynamisme et sur leur capacité d’adaptation à un monde en plein mutation.

Les derniers développements et les manœuvres des différentes puissances intéressées par le Sahara central laissent présager une accélération du processus de réorganisation géopolitique de la région. Et les Touaregs ne peuvent pas se permettre d’être une fois encore les oubliés de cette nouvelle page de l’Histoire qui s’écrit sous leurs yeux.

Effervescence géopolitique au Sahara central

Les convoitises traditionnelles des puissances régionales et internationales se confondent aujourd’hui avec la guerre, y compris psychologique, livrée aux groupes « islamistes » qui apparaissent partout dans la bande sahélo-saharienne.

Cet intérêt s’est illustré ces dernières années par des manœuvres militaro-sécuritaires censées donner une visibilité et une efficacité aux efforts « concertés » de certaines puissances pour contenir l’action du banditisme transfrontalier et des éléments islamistes qui se seraient déployés dans la région depuis quelques années. Ces évolutions sont à situer dans le contexte actuel de réorganisation géostratégique initiée par les Américains pour accentuer et élargir leur influence et « accompagner » les évolutions politiques dans la région.

Ainsi cette région pourrait devenir un terrain d’affrontement pour des enjeux qui n’ont aucun rapport avec les intérêts des populations locales. Ces dernières risquent, en effet, de se retrouver prises en tenailles entre les protagonistes d’un conflit étranger à leurs préoccupations immédiates. Il est à craindre que l’espace sahélo-saharien, qui a toujours été considéré par les Etats comme une zone militaire, ne le devienne davantage.

Aujourd’hui se dégage un certain consensus pour reconnaitre que toute vraie politique sécuritaire, dans la région, devrait impliquer une large participation des populations locales qui, seules, maîtrisent le terrain et sont capables d’assurer leur propre sécurité. En effet, les Etats du Mali et du Niger n’ont pas les moyens d’assurer cette sécurité et leurs rapports avec les populations locales ne leur permettent pas de structurer une politique de sécurité à même d’endiguer l’insécurité et de combattre le banditisme et les différents trafics. Cela ne pourra se faire, de manière efficace et durable, que dans le cadre d’une réelle politique de régionalisation qui permettrait à ces populations de prendre en charge leur développement. Une approche qui permettrait aux régions touarègues de construire des rapports apaisés avec leurs Etats respectifs et qui pourrait désamorcer les tensions liées à la forte centralisation actuelle des pouvoirs et des décisions.

Les Touaregs sont déterminés aujourd’hui à s’inscrire dans les nouvelles dynamiques induites par la globalisation de l’économie et la mondialisation de manière générale. Les nouveaux équilibres mondiaux et les bouleversements consécutifs à la chute du mur de Berlin ont également fait évoluer les schémas de pouvoir hérités de la colonisation et basés sur des pouvoirs essentiellement ethnocentristes entretenus par l’ancienne puissance coloniale.

La communauté internationale officielle, qui a toujours fermé les yeux sur les violations des droits de l’homme dans cette région du monde, porte une grande responsabilité dans la recrudescence de l’insécurité et le développement des organisations mafieuses qui utilisent parfois le sentiment d’injustice qui habitent certains Touaregs pour susciter leur complaisance. Les événements de ces dernières années ont montré que les grandes théories sur la démocratie et les droits de l’homme ne s’appliquent manifestement pas en faveur du peuple touareg.

Survie Touarègue-Temoust Lyon (France)

7 mai 2010

Re: Touaregs:1990–2010:Vingt années d’une renaissance en mar

Auteur: zoro
Date: le 08/05/2010 à 11:47
Citation: “Le 7
Chapeau Jackie pour une analyse si exaustive sur la situation de kel tamasheq.Pour ma part ta phrase cité si dessous est la solution absolue pour le peuple touareg qui à assez souffert des illusions que lui miroitent les ONG et L'onu"le mettre dans son Droit".

Aujourd’hui, il s’agit pour les Touaregs de ne compter que sur leur propre dynamisme et sur leur capacité d’adaptation à un monde en plein mutation /quote]
une ptite question: pourquoi parmis les accords de paix tu n'a pas cité ceux de Bahanga et du MNJ?merci

Re: Touaregs:1990–2010:Vingt années d’une renaissance en marche

Auteur: jackie01
Date: le 08/05/2010 à 15:56
Petite précision, l'auteur de l'article est Abdoulahi Attayoub...

Re: Touaregs:1990–2010:Vingt années d’une renaissance en marche

Auteur: Dilo
Date: le 08/05/2010 à 21:08
Je n'ai pas eu le temps de lire cette nouvelle relance de la propagande de M. Attayoub.
Déjà dès la 1ère ligne, la mauvaise foi se fait ressentir.
Avec regret nous avions vécu les tristes évènements de Tchintabaraden en 1990. Mais tout homme constructif, honnête, aurait pu commencer par ce qui a précédé et était la cause de ce triste massacre impardonnable.
Ne pas reconnaitre ses propres torts et reclamer que les Juges s'en prennent aux autres tueurs, ce n'est pas édifiant.

Je lirai tout le texte, mais ne me relancerai pas dans une polémique inutile, surtout que, ici, cela ressemble rebelote, à une nouvelle relance (??) d'une rebellion ridicule et meurtière pour les innocents Touareg et les autres ethnies.

On peut de visu se rendre compte à Niamey, dans les quartiers Dubaï, Recasement, et un peu partout dans cette ville, toutes ces villas cossues construites par les Ex-rebelles après chaque partage des dollars encaissés, pendant que les pauvres et honnêtes touareg rescapés vivotent dans leurs terroires rendus invivables à cause des rebelions absurdes.

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